YELLOWSTRAPS - LA BULLE CAFÉ - LILLE - JEU. 02/11/2023 à 20H30
A GAUCHE DE LA LUNE, EN ACCORD AVEC BLEU CITRON, PRESENTE
YELLOWSTRAPS EN CONCERT À LILLE
A GAUCHE DE LA LUNE, EN ACCORD AVEC BLEU CITRON, PRESENTE
YELLOWSTRAPS EN CONCERT À LILLE
Fondé à Bruxelles par les frères Yvan et Alban Murenzi, YellowStraps façonne depuis bientôt 10 ans une néo-soul hybride qui caresse les sens et affole les perceptions, validée par la bouillonnante scène rap belge (Roméo Elvis, Le Motel, L’Or du Commun, etc.). Avec Tentacle, le duo se change en solo (Alban part, Yvan reste) et déborde du cadre sans renier son ADN. YellowStraps passe en vitesse-lumière.
Boucle de guitare électrique, voix et piano flottant dans l’écho, beat trap ascendant jazz, featurings d’amis sûrs de la scène rap bruxelloise (Roméo Elvis et Swing) : lâché au début du printemps, le single “MERCI” est un précis du style des frères Murenzi tel qu’on le connaît depuis 2013. Leurs débuts avec Le Motel (du manifeste “Pollen” à l’album Mellow, 2016), leur titre de “Most Promising Artist” aux Red Bull Elektropedia Awards (2014), la décisive session COLORS (2019), les maxis Blame (2018) et Goldress (2020), tout cela est récapitulé en un single. Et pour cause : c’est le dernier qu’ils créent entièrement à deux. Une fête de famille (agrandie) avant transformation.
L’explication est simple : suite au Yellockdown Project (2020), mixtape de confinement composée vite (24h pour chaque titre) et remplie de feats (Crayon, Swing, Nelick, etc.), Alban a décidé de laisser Yvan seul aux commandes. Aucune lutte fratricide derrière cette décision mais une prise de conscience : pour le cadet Murenzi, le plaisir de créer est devenu inconciliable avec la pression du succès. “Je le comprends”, explique Yvan. “On a toujours fait de la musique comme un hobby, et c’est devenu un métier. Après Yellockdown, il y a eu une fissure. Il a compris que ça ne serait plus jamais pareil.” Sur la pochette, on les voit assis sur un canapé trop long, chacun à une extrémité, sereins mais déjà séparés. “C’était sans doute prémonitoire…”
Yvan a construit Tentacle sur cette absence, entre volonté d’imprimer une continuité (dire MERCI au passé) et de défricher de nouveaux espaces. Il y pousse plus loin son exploration du chant (en anglais mais aussi en français), tant sur le plan de la technique vocale, qui donne finesse et profondeur à ses toplines, que dans la manipulation d’effets électroniques (dont l’autotune, rejetée jusqu’ici “pour de mauvaises raisons”). Surtout, il s’est remis intensément à la production (qui était devenue le domaine du frangin), seul ou épaulé par quelques proches, dont son manager Jad El Alam et le bassiste Victor Defoort. “J’aime travailler en petite équipe, car chacun peut apporter sa touche sans mettre en péril ma direction artistique. Dans ma tête, ce que je veux est extrêmement précis”.
Parmi ces lignes directrices, on trouve un désir d’hybridation toujours plus vaste (activé par la découverte de King Krule aux débuts du groupe), intégrant les influences rock de sa jeunesse aux tropismes R&B, nu soul et electronica déjà en place. Mais aussi une quête d’“émotions indescriptibles” qui passe autant par l’écriture mélodique que par l’expérimentation. “J’ai passé des jours à travailler sur certaines sonorités et structures non académiques, tel un savant dans son laboratoire. C’était une manière de marquer mon territoire, de redéfinir les contours de YellowStraps.” Ainsi des tubes en puissance (le single “headown”, tout en élégance pop et mélancolie infectieuse, mais aussi “Notice”, “Flowin”, “Champagne” ou le très émotif “Writer’s Block” avec la rappeuse/chanteuse belge Blu Samu) côtoient des formes mutantes (“Acequia”, “156”, le presque kanyewestien “Necklace”). “Le meilleur compliment qu’on puisse me faire, c’est que ma musique est impossible à décrire.”
Tout change, sauf son sujet de prédilection, l’amour avec un grand A, celui qui élève et étrangle, parfois d’un seul geste. “Mes textes parlent de ce qui m’affecte profondément, ce qui prend le dessus sur moi. Ça m’a toujours fasciné de voir à quel point les relations amoureuses peuvent nous emmener loin, provoquer des sentiments extrêmes.” Sur ce point seulement, Tentacle peut s’entendre comme la conclusion d’une trilogie. “L’EP Blame était un déversement de haine suite à ma première longue relation. Goldress, une réflexion plus posée sur l’échec amoureux. Et Tentacle marque la phase d’acceptation. L’amour, c’est toujours le bordel, mais je suis en paix avec ça.”
Le YellowStraps nouveau est arrivé, à la fois fruit mûr d’un parcours déjà dense et premier bourgeon éclatant de jeunesse et d’invention. Moins en phase avec le rap qui l’a porté, loin de la froideur de la “musique de producteur”, Tentacle se déploie sans limite, entre paysages mentaux et trépidations du cœur.